Vingt quatre heures de rêves
2h30…. Quelqu’un frappe à la porte de
ma chambre. Je me lève. J’ouvre. Personne dans le couloir. Je n’ai
quand même pas rêvé ? Pourtant quelqu’un a bel et bien frappé. Je me
recouche. Et si jamais une ombre était venue me prévenir du grand
moment tant attendu ? Je bondis de mon lit, enfile un vêtement et sors
à la hâte. Au séjour, personne ! Je file au labo. En cours de route mon
regard est attiré par une source lumineuse inhabituelle. Non, ce n’est
pas vrai ! Quand même pas ! Mais si. Je n’y crois pas. Je me mets à
courir, passe dans mon bureau, ajuste à la hâte mes vêtements chauds,
saisis mon appareil photo et me voilà dehors. Les autres aussi sont là,
ombres à l’abri du vent, dans un silence impressionnant que seul le
ronronnement de la centrale ose troubler accompagné des chants
nocturnes des Fulmars.
Je lève les yeux et là, dans le ciel,
j’assiste au grand rendez-vous. C’est la nuit où les anges, les fées,
les esprits, les magiciens et les étoiles se rencontrent pour leur
premier grand bal de l’hiver. Un bal où les tenues de soirées sont de
rigueur, où tout scintille : les verres, les paillettes, les bijoux et
les yeux ! Des parures vertes, jaunes, violettes et rouges apparaissent
et défilent et s’enlacent au firmament.
Je n’en crois pas mes yeux.
Là haut dans la stratosphère, les éléments nous offrent le spectacle
grandiose d’une actrice silencieuse et fantastique : une aurore
australe !
3h40…. Je retourne me coucher mais le sommeil ne viendra
pas. Et si j’avais rêvé ? Non. Ce matin, mes photos sont là pour
me prouver que ce n’était pas un rêve. Je sors du dortoir. Tiens ! Mais
que s’est-t-il passé ? La surface de la mer a soudainement changé !
Non, ce n’est pas vrai ? Je dois me rendre à l’évidence. Durant la
nuit, cette nuit dont je ne saurais jamais si j’ai rêvé ou dormi, la
surface de la mer s’est figée. Une petite couche de quelques
centimètres est apparue. C’est fait ! Avec les -12°C enregistrés cette
nuit et l’absence totale de vent, la banquise a commencé de se former.
En
moins de 24h, nous venons d’assister à deux phénomènes absolument
fantastiques et propres aux régions polaires. Mais quand est-ce que ça
va s’arrêter ?
Pour cette nuit prochaine, la météo nous annonce un
ciel absolument vierge de tout nuage. Je ne sais pas pourquoi,
mais je sens que ce n’est pas encore cette nuit que je vais pouvoir
dormir… Vingt quatre heures de rêves.
Nouvelles en vrac :
- nouvelle aurore la nuit dernière
- la banquise continue sa solidification
- les poussins de pétrels des neiges et de damier du Cap ont définitivement quitté l'île des Pétrels pour cette année.